Elles demeurent des problèmes de santé publique et constituent donc une préoccupation pour les dirigeants. Il s’agit des Maladies Tropicales Négligées qui continuent de faire des victimes, notamment dans les régions à faibles revenus. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les maladies tropicales négligées affectent plus d’un milliard de personnes. Les communautés appauvries et vivant dans des régions tropicales sont les plus touchées.
Chaque année, environ 1,6 milliard de personnes ont besoin de traitement à cause d’une des maladies tropicales négligées. Les personnes porteuses des maladies tropicales négligées à manifestations cutanées (MTN-C) telles que l’ulcère de Buruli, la lèpre, le pian, la gale, la filariose lymphatique, le mycétome, la leishmaniose cutanée, la leishmaniose dermique post-Kala-azar et l’onchocercose, sont victimes de stigmatisation et de discrimination.
« Ces maladies peuvent entraîner chez des patients, des déformations cutanées visibles voire des handicaps physiques avec des incapacités permanentes. Les victimes des MTN-C sont soumises à une stigmatisation sociétale et une discrimination tout au long de leur vie », a affirmé Christian Mitokpe, un responsable administratif. Malgré les efforts des gouvernements et des organisations internationales, les ressources financières allouées à l’éradication des MTN restent insuffisantes.
« Cet énorme fardeau financier pèse lourd sur les économies des pays endémiques, fournissant un argument économique solide pour investir dans la prévention, le diagnostic et le traitement précoce de ces maladies », a-t-il poursuivi. Dans ce cadre, un apport financier supplémentaire, en particulier du secteur privé, est vivement souhaité.
Un financement conséquent pour une lutte efficace
L’implication du secteur privé dans la lutte contre les MTN, notamment en termes financier n’est pas seulement nécessaire, c’est essentiel. « La prise en charge des maladies tropicales négligées repose sur un véritable paradoxe », a confié Christian Johnson, directeur médical de la Fondation Raoul Follereau. En effet, les maladies tropicales négligées concernent les populations rurales les plus pauvres, qui ont besoin d’une prise en charge très spécialisée et très coûteuse.
« Par exemple, la prise en charge d’un malade de l’ulcère de Buruli comporte trois composantes. Il y a la prise en charge médicamenteuse avec des antibiotiques spécifiques, qui doivent être administrés aux malades quotidiennement pendant huit semaines. La chirurgie qui consiste à faire des greffes de peau pour couvrir les plaies et si possible faire des traitements de lésions osseuses. Ce qui revient parfois extrêmement cher. Et pour les personnes qui ont déjà des infirmités, faire de la chirurgie de reconstruction qui coûte également très chère », explique Christian Johnson.
Il renchérit : « il faut également faire la prévention des invalidités à travers la kinésithérapie et la confection d’anthèses et de prothèses pour les personnes qui ont déjà des handicaps graves. » Prenant le cas d’un individu atteint de la lèpre, il explique qu’un adulte atteint de cette maladie, souffrant d’une infirmité aux mains, aux yeux et aux pieds, devra vivre avec cette condition toute sa vie. Cela implique un besoin permanent de prise en charge, souvent très coûteuse. « Il est donc crucial que la lutte contre ces maladies s’inscrive dans un partenariat dynamique entre le secteur public et privé », a-t-il recommandé.
« […] faire des économies d’échelle demain »
Reconnues pour maîtriser le langage des affaires, les entreprises du secteur privé font des efforts louables dans le financement de la lutte contre les MTN. Selon Franz Okey, Coordonnateur de l’Ong Speak Up Africa au Bénin, le secteur privé joue un rôle clé dans la lutte contre les maladies tropicales négligées en intégrant la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) dans leurs stratégies.
Les entreprises, de plus en plus conscientes de leur impact social, peuvent être convaincues d’investir dans cette cause grâce à des argumentaires solides et des plaidoyers mettant en avant les bénéfices économiques et sociétaux de leur engagement. Par ailleurs, une collaboration structurée entre le secteur privé, les décideurs politiques, les médias et la société civile est essentielle pour sensibiliser et mobiliser des ressources.
La mise en place de cadres multi-acteurs et de mécanismes de financement durable permettra de combler les lacunes existantes dans la lutte contre les MTN. L’objectif est de capter l’intérêt du secteur privé béninois afin d’investir dans cette lutte, à la fois pour sauver des vies et réaliser des économies à long terme. « Il est urgent de mobiliser le secteur privé béninois, afin que nous nous investissions tous dans la lutte contre les maladies tropicales négligées aujourd’hui pour sauver des vies et faire des économies d’échelle demain », a exhorté Franz Okey.