Lutte contre les MTN : les décideurs politiques en première ligne pour une action efficace

Les Maladies Tropicales Négligées (MTN) constituent un défi majeur de santé publique, touchant principalement les populations vulnérables des pays en développement. Malgré leur impact socio-économique considérable, elles reçoivent encore peu d’attention. L’implication des décideurs politiques, notamment les parlementaires, élus communaux et locaux, serait cruciale pour renforcer la lutte contre ces maladies.

Dix-sept : c’est le nombre de maladies tropicales négligées sur lequel l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a mis l’accent. Selon un document daté de 2023, il s’agit des maladies virales (Dengue, Chikungunya, Rage), des maladies bactériennes (Trachome, Ulcère de Buruli, Pian, Lèpre) et des maladies parasitaires (maladie de Chagas, Trypanosomiase humaine africaine, Leishmanioses, Téniasis et Cysticercose, Dracunculose, Échinococcose, Trématodoses d’origine alimentaire, Filariose lymphatique, Onchocercose, Schistosomiase, Géohelminthiases (helminthiases transmises par le sol) incluant la stongyloïdose.

La plupart de ces 17 maladies tropicales négligées sont des maladies parasitaires dues à des protozoaires ou des helminthes. Certaines sont transmises par les animaux hôtes, d’autres par des vecteurs tels que les moustiques. D’autres, comme la dracunculose, sont transmises par la contamination de l’eau, alors que les géohelminthiases sont transmises par les sols contaminés par les œufs ou les larves de parasites.

Selon le même document, trois nouvelles maladies s’ajoutent aux 17 maladies. Il s’agit de la gale et autres ectoparasitoses, le mycétome et la chromomycose et autres mycoses (paracoccidioïdomyces, sporotrichose), sans oublier les envenimations par les serpents. Les individus atteints de ces maladies notamment les maladies tropicales négligées à manifestations cutanées (MTN-C) comme l’ulcère de Buruli, la lèpre, le pian, la gale, la filariose lymphatique, le mycétome, la leishmaniose cutanée, la leishmaniose dermique post-Kala-azar et l’onchocercose, sont victimes de stigmatisation sociétale et d’une discrimination tout au long de leur vie.

« Dans certains pays comme le Bénin, les personnes affectées sont rejetées par leur communauté. Ce qui entraîne des dommages psychologiques importants. Ces maladies altèrent la qualité de vie de ces populations mal desservies », a observé Christian Mitokpe, un acteur politique. L’OMS estime que plus de 1,7 million de personnes ont besoin d’un traitement pour au moins une MTN chaque mois. Elle recommande cinq interventions stratégiques de base pour lutter contre la charge des MTN : la chimio-prévention, la prise en charge individuelle des cas, la lutte contre les vecteurs, l’eau, l’assainissement et l’hygiène.

Malheureusement, plusieurs individus atteints de l’une de ces maladies ne disposent pas des moyens nécessaires pour se faire soigner. D’un autre côté, ces maladies reçoivent encore peu d’attention par rapport aux autres maladies infectieuses. D’où la nécessité des mesures plus urgentes comme l’implication des décideurs politiques.

Une mobilisation politique pour un enjeu de santé publique

« Pour lutter contre les MTN, l’Etat central a pris plusieurs dispositions fortes en 2012, dont la création des Centres de dépistage et de traitement de la Lèpre et de l’Ulcère de Buruli (CDTLUB), dans le respect des recommandations de l’OMS. Ces dispositions ne sauraient donner un impact fort sans la contribution des collectivités locales et leaders d’opinion », a fait savoir Christian Mitokpe.

Une déclaration qui met en exergue le rôle crucial des décideurs politiques dans la lutte contre les MTN.  Il explique : « la prise en charge des MTN étant difficile du fait de l’éloignement des personnes infectées vivant dans des milieux ruraux avec peu d’accès aux structures de soins, nous élus municipaux jouons un grand rôle dans l’acceptation des cliniques mobiles dans les villages et dans la sensibilisation des sujets, ainsi que de leur famille par le biais des mobilisateurs communautaires. »

Mieux, « les consultations foraines avec des équipes mobiles étant organisé avec les chefs villages et leader d’opinion pour le dépistage intégré des MTN et des autres maladies de la peau au plus près des patients, on observe une forte adhésion populaire. Mieux, les crieurs publics sont aussi associés dans la sensibilisation populaire afin de réduire la stigmatisation des personnes infectées. Il n’est pas à occulter que sous l’autorisation des élus locaux, des espaces publics sont dédiés au dépistage et aux différentes activités y afférentes », explique Christian Mitokpè qui appelle à la pérennisation de ces mesures, voire leur amélioration afin d’éliminer définitivement les MTN au Bénin.

Les décideurs politiques à l’avant-garde d’une lutte efficace

Allant dans le même sens d’idée que Christian Mitokpe, Christian Johnson, directeur médical de la Fondation Raoul Follereau affirme que sans les décisions politiques, aucune lutte efficace ne peut se mener aussi bien de façon intensive que sur la durée. Interrogé sur le même sujet Franz Okey, Coordonnateur de l’Ong Speak Up Africa affirme : « le travail avec les élus locaux est important. Le travail avec les parlementaires est important. Le travail avec les médias est important. Le travail avec les organisations de la société civile est très important également. »

Les élus locaux et communaux sont donc au cœur des stratégies de lutte contre les MTN, notamment à travers la sensibilisation communautaire avec l’organisation des campagnes de sensibilisation et de prévention adaptées aux réalités locales, le renforcement des infrastructures sanitaires locales et la collaboration avec les organisations de la société civile. Ce, grâce à un travail conjoint avec les ONG et les associations permettant de mieux coordonner les efforts et d’optimiser l’impact des interventions.

Les parlementaires de leur côté, peuvent aider grâce à l’adoption de lois facilitant l’accès aux traitements et aux infrastructures sanitaires, l’augmentation des budgets dédiés à la lutte contre les MTN, garantissant une meilleure prise en charge des patients, le contrôle et le suivi des engagements gouvernementaux en matière de lutte contre ces maladies. Par ailleurs, à travers les groupes parlementaires dédiés à la santé, ils peuvent exercer une pression sur l’exécutif pour assurer une mobilisation effective des ressources.

L’implication des décideurs politiques dans la lutte contre les MTN, vue sous ces aspects, nécessite une action concertée et soutenue pour espérer un avenir où ces maladies ne seront plus une menace pour les populations les plus vulnérables.

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