Aucun calendrier concret pour sortir des énergies fossiles, aucun plan crédible pour réduire les émissions : seulement des principes généraux qui protègent les intérêts des plus gros pollueurs, alors que notre planète brûle. À ce rythme, l’objectif de limiter le réchauffement à +1,5 °C, cœur de l’Accord de Paris, s’éloigne dangereusement.
Pour l’Afrique, et pour le Bénin en particulier, ce constat n’est pas qu’une simple déception diplomatique : c’est un signal d’alarme. Nous subissons déjà de plein fouet les effets du dérèglement climatique, et si rien ne change, l’avenir sera encore plus difficile pour nos communautés. Selon le rapport State of the Climate in Africa 2024 de l’Organisation météorologique mondiale, l’année 2024 a été la plus chaude jamais enregistrée sur le continent. Sécheresses prolongées, vagues de chaleur extrêmes, inondations meurtrières… ces événements frappent en priorité celles et ceux qui ont le moins de moyens pour y résister.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : l’Afrique subsaharienne pourrait avoir besoin de 30 à 50 milliards de dollars par an pour s’adapter aux impacts climatiques. Ici, au Bénin, des enquêtes montrent que 67 % des populations rurales subissent des sécheresses plus graves, 56 % signalent des pertes de récoltes, et 45 % constatent une augmentation des inondations au cours des dix dernières années. Et pourtant, moins d’un Béninois sur deux a entendu parler du changement climatique. Ces réalités rappellent une évidence : le climat n’est pas un concept abstrait, c’est notre vie quotidienne, nos terres, nos revenus et l’avenir de nos enfants qui sont en jeu.
Pour une transition juste, l’Afrique doit agir elle-même
Face à l’inaction internationale, nous n’avons plus le luxe d’attendre. L’Afrique doit reprendre en main sa transition énergétique, sur des bases justes, souveraines et adaptées à nos réalités. Cela veut dire : un virage massif vers les énergies renouvelables, avec un focus sur les solutions décentralisées comme les mini-réseaux solaires, les systèmes autonomes et les initiatives communautaires ; des financements locaux et innovants, vraiment accessibles, qui soutiennent les communautés en première ligne plutôt que les industries responsables de la crise ; et un appui renforcé à l’adaptation à travers l’agriculture résiliente, la gestion de l’eau, les infrastructures durables et les systèmes d’alerte précoce.
Il est aussi crucial de mettre les femmes, les jeunes et la société civile au centre de cette transformation. Ce sont elles et eux qui portent déjà des solutions concrètes et résilientes sur le terrain. Une transition juste ne se décrète pas : elle se construit avec les peuples, pas pour eux.
L’énergie décentralisée : la preuve que le changement est possible dès maintenant
Partout en Afrique, des initiatives montrent qu’il est possible de transformer nos vies avec des solutions locales et renouvelables. Au Kenya ou au Nigeria, les ménages raccordés à des mini-réseaux solaires voient leurs revenus augmenter en quelques mois. Les impacts sont multiples : sortie des lampes au kérosène, amélioration de la santé, accès prolongé à l’éducation, opportunités accrues pour les femmes, création de petites entreprises et d’emplois locaux. Ces exemples confirment une vérité : la transition énergétique est aussi un levier de justice sociale, de dignité et de développement.
Vers la COP31 : une voix africaine forte et déterminée
La COP30 n’a pas apporté les réponses attendues, mais elle nous rappelle une certitude : si l’Afrique veut protéger ses terres, ses communautés et ses économies, elle doit prendre les choses en main. Nous ne pouvons plus attendre. Dès aujourd’hui, notre continent doit porter :
- une exigence ferme de sortie des énergies fossiles ;
- un accès simple et équitable aux financements pour l’adaptation et les énergies renouvelables ;
- un soutien massif aux initiatives communautaires et décentralisées ;
- une vision claire d’une transition juste, souveraine et inclusive.
Pour le Bénin, ce n’est pas seulement une urgence : c’est une opportunité pour devenir un exemple régional de leadership climatique, porté par nos communautés, notre société civile et notre capacité d’innovation.
