Accueil A la une Dr Appolinaire Gnanvi, DG FNEC : « le défi majeur du FNEC est de mobiliser des ressources vertes extérieures »

Dr Appolinaire Gnanvi, DG FNEC : « le défi majeur du FNEC est de mobiliser des ressources vertes extérieures »

Dans un contexte mondial marqué par le réchauffement et les dérèglements climatiques, le Bénin ne peut pas rester en marge de la gestion de ces problématiques au niveau local, et ce, en lien avec les organismes internationaux en charge de ces questions. Au Bénin, le Fonds national pour l’environnement et le climat (FNEC) s’active pour mettre en œuvre, selon sa mission, la politique nationale en matière d’environnement et de climat. L’un des enjeux étant la mobilisation des ressources pour financer ses projets. Interview du Directeur général sur les actions et les réalisations du FNEC.

Que pouvez-vous nous dire pour présenter globalement cette structure à travers sa mission et ses objectifs ?

Le Fonds national pour l’environnement et le climat (Fnec) est un mécanisme financier mis en place par le gouvernement du Bénin pour accompagner les programmes et projets qui ont trait à la protection et à la gestion rationnelle de l’environnement, des ressources naturelles et forestières, à l’amélioration du cadre de vie des populations et qui sont susceptibles d’assurer la résilience des communautés vulnérables aux changements climatiques. Sa vision est formulée ainsi qu’il suit : « le Fnec est à l’horizon 2030, un mécanisme de référence en matière de mobilisation de ressources vertes et de financement des initiatives environnementales et climatiques pour un développement durable au Bénin. »

Quant aux objectifs qui lui sont assignés, on peut retenir entre autres : l’accroissement de la mobilisation au plan national et international des ressources financières pour le financement des secteurs de l’environnement et du climat, l’optimisation du financement des initiatives environnementales et climatiques, et le renforcement des capacités des différents acteurs des secteurs de l’environnement et du climat.

Le besoin de financement du secteur de l’environnement et du climat est énorme. Comment mobilisez-vous les ressources financières nécessaires à l’accomplissement de votre mission ?

Dans un passé récent, les écotaxes constituaient la grande partie des ressources propres du Fnec auxquelles il faut ajouter les ressources mobilisées au plan international. Toutefois, avec la dernière transformation juridique, le décret n°2021-191 du 05 mai 2021 fait du Fnec, l’institution par excellence chargée de la mobilisation des ressources extérieures.

Fnec, l’institution par excellence chargée de la mobilisation des ressources extérieures.

Sur ce plan, l’architecture mondiale actuelle en matière de finance climatique est marquée par une diversité de ressources provenant de plusieurs sources. Ces sources de financement offrent un accès direct, soit par le processus d’accréditation, soit par l’entremise des appels à projets ou par le biais d’effets de performance. Le Fnec est accrédité auprès de deux mécanismes financiers internationaux à savoir : le Fonds vert pour le climat (Fvc) et le Fonds d’Adaptation.

Le Fnec est un mécanisme de financement des projets environnementaux et climatiques. Comment accède-t-on à ces financements ?

Le Fonds national pour l’environnement et le climat dispose de trois modes de financement. Il s’agit des appels à projets, des interventions directes et de l’initiative LoCAL (Local Climate Adaptive Living facility). Les appels à projets représentent le mode de financement le plus privilégié. Des critères de sélection sont bien définis pour évaluer toutes les fiches soumises afin de retenir les meilleures idées de projet qui feront objet de financement. Le financement est planifié sur la période de mise en œuvre du projet conformément au plan de financement convenu de commun accord avec les promoteurs. La durée de mise en œuvre peut varier entre un et cinq ans au maximum.

Les interventions directes sont une exception à la procédure normale d’appel à projets et constituent un mode dérogatoire de financement des projets. Ce mode ne s’utilise qu’en cas de forces majeures sur instruction du Ministre de tutelle pour assurer et garantir la sécurité des populations par suite d’un évènement inattendu ou d’une catastrophe environnementale et climatique. Dans ce cas, un comité technique ad’hoc est mis en place par le DG Fnec pour évaluer et/ou recadrer un pareil projet afin de rendre ses impacts beaucoup plus perceptibles. Ce mode d’intervention est ponctuel et ne dépasse guère l’échelle d’une année.

Le LoCAL (Local Climate Adaptive Living facility) est le fruit du partenariat entre le Fonds d’équipement des Nations Unies (Fenu) et le Fnec. Il permet d’investir localement dans la résilience aux chocs climatiques dans les communes les plus vulnérables au Bénin depuis 2016. Ce mécanisme de financement local de l’adaptation au changement climatique se poursuit dans neuf communes bénéficiaires et s’étendra à 28 communes du Bénin avec l’appui du Fonds vert pour le climat.

Avec l’accréditation du Fnec au Fonds d’Adaptation (Fa), quels sont les défis, les enjeux et les opportunités qui découlent de cette accréditation pour le Bénin ?

Aujourd’hui, le défi majeur à relever par le Fnec est celui de la mobilisation des ressources vertes extérieures destinées à promouvoir un développement écologiquement viable au Bénin. Pour relever ce défi, les orientations stratégique 2021-2025 du Fnec ont retenu trois piliers fondamentaux à savoir : mobiliser des ressources additionnelles, durables et innovantes, financer les initiatives environnementales et climatiques, et consolider la bonne gouvernance. Les enjeux et les opportunités qui découlent de l’accréditation du Fnec au Fonds d’adaptation ne sont pas négligeables. D’autant que ce mécanisme financier vient d’augmenter la subvention par pays qui était de 10 millions de dollars à 20 millions de dollars US.

Les enjeux et les opportunités qui découlent de l’accréditation du Fnec au Fonds d’adaptation ne sont pas négligeables.

Dans la dynamique de mobilisation des ressources, le Fnec a soumis deux notes conceptuelles qui ont été approuvées par le Conseil d’Administration du Fonds d’Adaptation. Il s’agit du Programme intégré de renforcement de la sécurité alimentaire et de la résilience communautaire face aux changements climatiques dans les communes de Boukombé et de Bopa soumis par Caritas-Bénin, et le Projet de renforcement de la résilience aux changements climatiques des populations riveraines des forêts classées de Bassila et de Pénéssoulou au Centre du Bénin, soumis par la Société nationale du bois (Sonab).

A noter que le Fonds d’adaptation finance quatre études complémentaires nécessaires à l’élaboration du document de projet de la Sonab.

Le second mécanisme financier auquel le Fnec est accrédité, c’est le Fonds vert pour le climat. Quel bilan pouvez-vous dresser à travers ce partenariat ?

L’accréditation du Fnec au Fonds vert pour le climat (Fvc) est un long processus qui a connu son épilogue en 2019. Au titre des retombées de ce partenariat, on peut retenir, entre autres que : le Fnec a bénéficié d’une évaluation institutionnelle par un Cabinet britannique Pwc (Pricewaterhousecoopers), mandaté par le Fvc. Cette évaluation a révélé des lacunes. Des recommandations ont été également formulées et un plan d’actions a été élaboré pour la mise œuvre des recommandations avant le démarrage du processus. Ensuite, le Fnec a aussi bénéficié d’un appui post accréditation de la part du Fvc.

En dehors de ces deux mécanismes de financement, quelles sont les retombées de votre coopération avec les autres partenaires multilatéraux et bilatéraux ?

Dans le domaine de la coopération multilatérale, on peut retenir entre autres partenaires le Pnud : il a appuyé le Fnec à travers le projet d’élaboration du Plan national d’adaptation, notamment la réalisation de l’étude sur l’identification de nouveaux instruments fiscaux et non fiscaux environnementaux et des mécanismes novateurs de financement. Cette étude était destinée à améliorer la capacité de mobilisation des ressources par le Fonds national pour l’environnement et le climat (Fnec)

La Fao : le Fonds national pour l’environnement et le climat et l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (Fao) ont signé un contrat de partenariat pour le cofinancement du projet « Initiative Résilience Climatique du Bassin de l’Ouémé (Ocri) Bénin » soumis au Fonds vert pour le climat par la Fao.

ONU-Environnement : En 2018, ONU-Environnement a appuyé financièrement et techniquement le Fnec en mettant à sa disposition un expert. Pendant un an, ce dernier a accompagné le processus d’accréditation et a renforcé les capacités des cadres sur le système de sauvegarde environnementale et sur la politique genre du Fvc. Aussi, a-t-il financé la traduction de tous les documents nécessaires à l’accréditation du Fnec.

Le Mécanisme Mondial : Le Mécanisme mondial (Mm) est un outil de la Convention des Nations Unies pour la lutte contre la désertification (Cnulcd). Il a mis à la disposition du Fonds national pour l’environnement et le climat un expert international pour appuyer l’élaboration du projet du secteur agriculture identifié dans le processus d’appel à projet du Pas-Pna soumis au Fvc. Au plan bilatéral, le principal partenaire du Fnec c’est le Ministère Allemand de l’économie et du climat (Bmwk). La République d’Allemagne appuie le Fnec à travers les deux initiatives que sont : le Projet d’appui scientifique au processus de Plans nationaux d’adaptation (Pas-Pna). Le Pas-Pna est mis en œuvre au Bénin par la Gi en coopération avec Climate analytics et le Centre de partenariat et d’expertise pour le développement durable (CePED), sous la tutelle du Ministère du cadre de vie et du développement durable (Mcvdd).

Des quatre composantes du Pas-Pna, la troisième relative à la facilitation de l’accès au financement de mesures d’adaptation prioritaires a permis au Fnec de bénéficier d’une subvention pour organiser un appel à projets pour la sélection d’avant-projets d’adaptation destinés à mettre en œuvre les priorités du PNA. En outre, de bénéficier d’une nouvelle subvention pour le développement des notes conceptuelles puis des propositions de financement. Le Fnec a également bénéficié d’un appui financier et technique pour la réalisation des études techniques nécessaires à la finalisation du document de projet du chenal de Cotonou à soumettre au Fonds d’adaptation. Cet appui a permis d’élaborer les documents exigés par le Fvc pour lever les conditions d’accréditation.

L’Initiative Internationale sur le Climat (IKI Small Grant) : Ce projet est en synergie avec les mesures prioritaires de la Contribution déterminée au niveau national du Bénin, le Programme d’actions du gouvernement (Pag) et les Objectifs du développement durable (Odd). Il vise également à contribuer à la réalisation des objectifs de l’Accord de Paris et de la Convention sur la Diversité Biologique. Ladite initiative comporte deux composantes. L’objectif de la première composante est de sélectionner et de financer environ cinq projets sur le climat et/ou la biodiversité portés par des organisations nationales de la société civile régulièrement constituées. Quant à la composante 2, elle vise le renforcement des capacités du Fnec à travers une série d’activités.

Quels sont les impacts tangibles des interventions du Fnec sur l’amélioration du cadre de vie des populations béninoises ?

L’impact des interventions du Fnec est perceptible à travers : le renforcement des capacités institutionnelles et opérationnelles des partenaires nationaux dans les domaines de l’environnement et du climat. Il y a l’amélioration du cadre de mobilisation et de planification des ressources au niveau des collectivités locales et l’adoption de comportements éco citoyens. Le renforcement de la résilience des populations vulnérables aux changements climatiques et la réduction de l’empreinte carbone. Sans oublier la préservation de la biodiversité marine et l’attractivité du Littoral béninois sur les 125 km de côtes.

Comment appréciez-vous la perception de la problématique des changements climatiques par les populations béninoises ?

Contrairement aux préjugés, les populations ont une bonne connaissance des aléas climatiques. C’est ce que révèlent les résultats du « Projet de Capitalisation des savoirs et savoir- faire locaux pour la gestion du climat dans les communes de Savè et Ouèssè (CaSaLoGeC) » financé par le Fnec. En effet, dans toutes les sociétés, l’homme subit, observe, analyse et tente d’expliquer les phénomènes naturels (météorologiques, telluriques…). Les populations du Bénin ne dérogent pas à ce principe. En majorité agricoles, elles ont une connaissance basique des éléments du temps et du climat (les pluies, les vents…) mais aussi de l’articulation saisonnière (les saisons pluvieuses et sèches notamment) et des prédicteurs de gestion des variabilités climatiques.

L’homme subit, observe, analyse et tente d’expliquer les phénomènes naturels.

De ce fait, elles disposent des repères empiriques qui leur permettent de bien pratiquer les activités agricoles, mais aussi de se protéger de l’incertitude climatique. Par ailleurs, ces populations apportent une diversité de réponses et des modes d’adaptation aux aléas climatiques. Elles prévoient les saisons à partir des indicateurs tels que la chaleur, la rosée, l’harmattan, les signes précurseurs de la sécheresse ou des fortes crues, l’apparition des feuilles de certains arbres, les vols de certains oiseaux etc. Malgré ces connaissances, la majorité de la population béninoise reste vulnérable aux effets néfastes des changements climatiques.

Existe-il au niveau du Fnec, un programme de sensibilisation des masses sur les questions climatiques et environnementales ?

La problématique de la sensibilisation des masses sur les questions climatiques est réglée par le guide d’éligibilité des projets soumis au financement du Fnec. En effet, dans la catégorisation des projets, figurent les micro-projets qui sont généralement des projets de sensibilisation ou de renforcement des capacités susceptibles d’apporter des informations de bonne gouvernance environnementale ou climatique aux communautés. Le coût du financement de ce genre de projets est compris entre dix millions (10.000.000) FCFA et vingt millions (20.000.000) FCFA. Par ailleurs, au niveau des autres catégories de projet, il existe toujours une composante sur la sensibilisation.

Quels sont vos principaux canaux de communication pour atteindre ces cibles ?

La communication avec le public se fait via plusieurs supports et canaux tels que le site web et les réseaux sociaux, les médias (Télévisions, radios, presse écrite), l’audiovisuel (documentaire, publi-reportage…), les conférences et visio-conférences ; et le Centre de Documentation et d’Information.

Quel est selon vous, l’importance du Centre de Documentation et d’Information dans ce dispositif de communication ?

Nous avons tendance à considérer l’accès à l’information comme une évidence alors que trop de personnes en sont privées. Le Fnec a pris conscience du rôle central de l’information spécialisée dans les politiques et stratégies pour relever les défis du développement durable. L’importance de l’information est non seulement reconnue au titre de l’Odd16, mais également par une vingtaine des cibles fixées dans le cadre général des Odd. Ces cibles sont assorties d’engagements explicites ou implicites visant à assurer la disponibilité de l’information, la connectivité et les compétences nécessaires à son accès et à son utilisation (bibliothèques, archives et centres de documentation). C’est dans le souci de contribuer à l’atteinte des Odd que le Fnec a créé un Centre de Documentation et d’Information spécialisé dans le domaine de l’environnement et du climat. Il a l’ambition de mettre à la disposition des acteurs du développement durable au Bénin, la documentation et l’information qui sont d’importants outils d’aide à la décision.

Quelles difficultés rencontre le Fnec dans la mise en œuvre de ses actions ?

La gestion de l’environnement étant une compétence partagée entre l’Etat et les communes, le Fnec octroie majoritairement ses financements aux collectivités locales. Par ailleurs, l’insécurité foncière et les conflits domaniaux pourraient compromettre la célérité et la mise en œuvre efficace des projets.

Parlez-nous des perspectives du Fnec

En termes de perspectives, le FNEC envisage l’audit organisationnel et institutionnel afin de renforcer ses capacités de mobilisation des ressources à l’international. Aussi, prévoit-il la mise en œuvre des cinq projets de l’initiative IKI, l’approbation des documents de projets issus des trois notes conceptuelles soumises au Fvc. Il en est de même pour l’approbation des documents de projets issus des deux notes conceptuelles soumises au Fa et la mise en œuvre efficiente de l’accord de partenariat signé avec la Fao.

Cette transformation institutionnelle a été déterminante dans l’aboutissement du processus d’accréditation du Fnec au Fonds vert pour le climat puis au Fonds d’adaptation.

C’est le lieu de remercier le Ministre du Cadre de Vie et du Développement Durable dont l’engagement personnel a permis la transformation juridique du Fnec. Cette transformation institutionnelle a été déterminante dans l’aboutissement du processus d’accréditation du Fnec au Fonds vert pour le climat puis au Fonds d’adaptation. Mes remerciements vont également à l’endroit de tous les partenaires du Fnec, qu’ils soient nationaux, bilatéraux ou multilatéraux. J’adresse mes sincères félicitations à mes collaborateurs pour les acquis enregistrés et je les encourage à redoubler d’ardeur pour les défis et enjeux futurs.

Réalisé par Mahougnon Frédéric Adounvo pour First Magazine

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