Au cœur du Sénégal, une jeune entrepreneuse passionnée a entrepris de transformer le paysage des soins de santé pour les femmes enceintes et les jeunes filles. Awa Badara Ndiaye, diplômée en informatique et fondatrice de la start-up Njureel, a lancé cette initiative inspirante après le décès tragique de sa cousine lors de l’accouchement. La mort de sa proche parente a suscité en elle une profonde prise de conscience et le désir ardent d’améliorer la prise en charge de la grossesse au Sénégal.
Le Sénégal est confronté à de nombreux défis en matière d’accès aux soins de santé, en particulier pour les femmes enceintes. Les hôpitaux sont souvent surchargés, le manque de personnel médical et l’organisation déficiente des établissements de santé contribuent à des retards dans la prise en charge. De nombreuses femmes enceintes se voient refuser l’accès aux soins en raison de ces problèmes, ce qui a malheureusement entraîné des décès évitables.
Awa Ndiaye a vécu la réalité de ces obstacles de près. Elle a dû visiter trois hôpitaux différents avant de trouver une place pour accoucher. Cette expérience n’est malheureusement pas unique, surtout dans les zones rurales et péri-urbaines. Les femmes enceintes ne disposent souvent pas des informations nécessaires pour savoir quand se rendre à l’hôpital, et elles manquent de ressources pour se faire accompagner. De plus, 53% des femmes enceintes ne bénéficient pas d’un suivi médical adéquat, et même lorsque cela est le cas, cela ne garantit pas une place pour l’accouchement.
Une plateforme de télémédecine pour les femmes enceintes et les jeunes filles
C’est alors qu’Awa Ndiaye, âgée de seulement 25 ans, a fondé ‘’Njureel’’ qui signifie en wolof « donner naissance » en fin 2019. Cette plateforme novatrice qui s’adresse non seulement aux femmes enceintes mais aussi aux jeunes filles, en leur offrant des conseils sur la santé sexuelle et reproductive, des sujets souvent tabous. Au cœur de Njureel, un service de télécommunication en ligne permet aux utilisateurs de bénéficier de consultations virtuelles depuis leur domicile. Ils peuvent choisir le médecin avec lequel ils souhaitent prendre rendez-vous, et leurs données médicales sont soigneusement enregistrées dans un espace personnel. Cette approche répond au manque de personnel médical et d’accessibilité, améliorant ainsi la prise en charge et l’assistance médicale.
Pour toucher un public encore plus large, notamment les femmes n’ayant pas accès à Internet (70% des femmes en milieu rural), Awa Ndiaye a lancé un service de téléassistance médicale fin 2020. Ce serveur vocal permet des échanges confidentiels avec des professionnels de la santé, qui peuvent fournir des conseils et une orientation médicale de base. La plateforme offre également une assistance psychologique en cas d’urgence ou de violence.
Grand Prix Digital pour l’Innovation en 2020
Njureel a déjà touché la vie de 5 000 utilisateurs, grâce à un réseau de plus de 30 professionnels de la santé et à une équipe de 10 employés dévoués. Les efforts d’Awa Ndiaye et de son équipe ont été récompensés en 2020 avec le Grand Prix Digital pour l’Innovation Numérique du Président de la République, ainsi que le Prix Innovating for Mothers at Risk in Senegal 2020. Ces distinctions soulignent l’engagement de Njureel à améliorer les services de santé, en offrant des prises en charge régulières, adaptées et personnalisées aux besoins des femmes.
Njureel Grand Prix Digital pour l’Innovation Numérique du Président de la République
Njureel incarne l’idée que des solutions technologiques innovantes peuvent résoudre des problèmes cruciaux et améliorer la vie de nombreuses personnes, en particulier dans les régions éloignées. Avec Awa Ndiaye à sa tête, cette start-up s’efforce de donner naissance à un avenir plus sûr et plus sain pour les femmes au Sénégal.
Des défis de déploiement
Selon Awa Badara Ndiaye, les nouvelles technologies peuvent énormément aider pour renforcer les systèmes existant et résorber le gap notamment en milieu rural. Mais cela génère aussi beaucoup de défis car il est très difficile au Sénégal de ‘’développer ces approches notamment à cause de la culture puisqu’il n’y a pas encore acceptation de ces technologies. Il faudra beaucoup de temps pour dissiper cette appréhension, y compris dans le secteur médical. L’Etat doit participer au changement des idées reçues’’.
Aussi, fait-elle part des barrières liées à l’accès à internet et l’usage des smartphones. Pour elle, il y a également un manque d’alliance entre l’Etat et les start-up. ‘’Il n’y a pas assez de partenariats alors que cela est bénéfique sur le terrain’’,a-t-elle déploré.